La Légende des Siècles eBook

This eBook from the Gutenberg Project consists of approximately 268 pages of information about La Légende des Siècles.

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pustules,
  Comme le pre de fleurs et le ciel de soleils!)
  Les feuilles s’empourpraient dans les arbres vermeils;
  L’eau miroitait, melee a l’herbe, dans l’orniere;
  Le soir se deployait ainsi qu’une banniere;
  L’oiseau baissait la voix dans le jour affaibli;
  Tout s’apaisait, dans l’air, sur l’onde; et, plein d’oubli,
  Le crapaud, sans effroi, sans honte, sans colere,
  Doux, regardait la grande aureole solaire. 
  Peut-etre le maudit se sentait-il beni;
  Pas de bete qui n’ait un reflet d’infini;
  Pas de prunelle abjecte et vile que ne touche
  L’eclair d’en haut, parfois tendre et parfois farouche;
  Pas de monstre chetif, louche, impur, chassieux,
  Qui n’ait l’immensite des astres dans les yeux. 
  Un homme qui passait vit la hideuse bete,
  Et, fremissant, lui mit son talon sur la tete;
  C’etait un pretre ayant un livre qu’il lisait;
  Puis une femme, avec une fleur au corset,
  Vint et lui creva l’oeil du bout de son ombrelle;
  Et le pretre etait vieux, et la femme etait belle. 
  Vinrent quatre ecoliers, sereins comme le ciel. 
  —­J’etais enfant, j’etais petit, j’etais cruel;—­
  Tout homme sur la terre, ou l’ame erre asservie,
  Peut commencer ainsi le recit de sa vie. 
  On a le jeu, l’ivresse et l’aube dans les yeux,
  On a sa mere, on est des ecoliers joyeux,
  De petits hommes gais, respirant l’atmosphere
  A pleins poumons, aimes, libres, contents; que faire,
  Sinon de torturer quelque etre malheureux? 
  Le crapaud se trainait au fond du chemin creux. 
  C’etait l’heure ou des champs les profondeurs s’azurent. 
  Fauve, il cherchait la nuit; les enfants l’apercurent
  Et crierent:—­Tuons ce vilain animal,
  Et, puisqu’il est si laid, faisons-lui bien du mal!—­
  Et chacun d’eux, riant,—­l’enfant rit quand il tue,—­
  Se mit a le piquer d’une branche pointue,
  Elargissant le trou de l’oeil creve, blessant
  Les blessures, ravis, applaudis du passant;
  Car les passants riaient; et l’ombre sepulcrale
  Couvrait ce noir martyr qui n’a pas meme un rale,
  Et le sang, sang affreux, de toutes parts coulait
  Sur ce pauvre etre ayant pour crime d’etre laid;
  Il fuyait; il avait une patte arrachee;
  Un enfant le frappait d’une pelle ebrechee;
  Et chaque coup faisait ecumer ce proscrit
  Qui, meme quand le jour sur sa tete sourit,
  Meme sous le grand ciel, rampe au fond d’une cave;
  Et les enfants disaient:  Est-il mechant! il bave! 
  Son front saignait; son oeil pendait; dans le genet
  Et la ronce, effroyable a voir, il cheminait;
  On eut dit qu’il sortait de quelque affreuse serre. 
  Oh! la sombre action, empirer la misere! 
  Ajouter de l’horreur a la difformite! 
  Disloque, de cailloux en cailloux cahote,
  Il respirait toujours; sans abri, sans asile,
  Il rampait; on eut dit que la mort, difficile,
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