La Légende des Siècles eBook

This eBook from the Gutenberg Project consists of approximately 268 pages of information about La Légende des Siècles.

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  Et le marquis, parlant aux femmes, leur prenait
  Les vetements des mains.

                         —­Laissez, que je l’habille! 
  Oh! quand sa mere etait toute petite fille,
  Et que j’etais deja barbe grise, elle avait
  Coutume de venir des l’aube a mon chevet;
  Parfois, elle voulait m’attacher mon epee,
  Et, de la durete d’une boucle occupee,
  Ou se piquant les doigts aux clous du ceinturon,
  Elle riait.  C’etait le temps ou mon clairon
  Sonnait superbement a travers l’Italie. 
  Ma fille est maintenant sous terre, et nous oublie. 
  D’ou vient qu’elle a quitte sa tache, o dure loi! 
  Et qu’elle dort deja quand je veille encor, moi? 
  La fille qui grandit sans la mere, chancelle. 
  Oh! c’est triste, et je hais la mort.  Pourquoi prend-elle
  Cette jeune epousee et non mes pas tremblants? 
  Pourquoi ces cheveux noirs et non mes cheveux blancs?

  Et, pleurant, il offrait a l’enfant des dragees.

  —­Les choses ne sont pas ainsi bien arrangees;
  Celui qui fait le choix se trompe; il serait mieux
  Que l’enfant eut la mere et la tombe le vieux. 
  Mais de la mere au moins il sied qu’on se souvienne;
  Et, puisqu’elle a ma place, helas! je prends la sienne.

  —­Vois donc le beau soleil et les fleurs dans les pres! 
  C’est par un jour pareil, les Grecs etant rentres
  Dans Smyrne, le plus grand de leurs ports maritimes,
  Que, le bailli de Rhode et moi, nous les battimes. 
  Mais regarde-moi donc tous ces beaux jouets-la! 
  Vois ce reitre, on dirait un archer d’Attila. 
  Mais c’est qu’il est vetu de soie et non de serge! 
  Et le chapeau d’argent de cette sainte Vierge! 
  Et ce bonhomme en or!  Ce n’est pas tres hideux. 
  Mais comme nous allons jouer demain tous deux! 
  Si ta mere etait la, qu’elle serait contente! 
  Ah! quand on est enfant, ce qui plait, ce qui tente,
  C’est un hochet qui sonne un moment dans la main,
  Peu de chose le soir et rien le lendemain;
  Plus tard, on a le gout des soldats veritables,
  Des palefrois battant du pied dans les etables,
  Des drapeaux, des buccins jetant de longs eclats,
  Des camps, et c’est toujours la meme chose, helas! 
  Sinon qu’alors on a du sang a ses chimeres. 
  Tout est vain.  C’est egal, je plains les pauvres meres
  Qui laissent leurs enfants derriere elles ainsi—­
  Ainsi parlait l’aieul, l’oeil de pleurs obscurci,
  Souriant cependant, car telle est l’ombre humaine. 
  Tout a l’ajustement de son ange de reine,
  Il habillait l’enfant, et, tandis qu’a genoux
  Les servantes chaussaient ces pieds charmants et doux
  Et, les parfumant d’ambre, en lavaient la poussiere,
  Il nouait gauchement la petite brassiere,
  Ayant plus d’habitude aux chemises d’acier.

IX

JOIE HORS DU CHATEAU

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