La Légende des Siècles eBook

This eBook from the Gutenberg Project consists of approximately 268 pages of information about La Légende des Siècles.

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  Quand il fut la, gisant et couche sous la pierre,
  Mourad ouvrit les yeux et vit une lumiere;
  Sans qu’on put distinguer l’astre ni le flambeau,
  Un eblouissement remplissait son tombeau;
  Une aube s’y levait, prodigieuse et douce;
  Et sa prunelle eteinte eut l’etrange secousse
  D’une porte de jour qui s’ouvre dans la nuit. 
  Il apercut l’echelle immense qui conduit
  Les actions de l’homme a l’oeil qui voit les ames;
  Et les clartes etaient des roses et des flammes;
  Et Mourad entendit une voix qui disait: 

  —­Mourad, neveu d’Achmet et fils de Bajazet,
  Tu semblais a jamais perdu; ton ame infime
  N’etait plus qu’un ulcere et ton destin un crime;
  Tu sombrais parmi ceux que le mal submergea;
  Deja Satan etait visible en toi; deja
  Sans t’en douter, promis aux tourbillons funebres
  Des spectres sous la voute infame des tenebres,
  Tu portais sur ton dos les ailes de la nuit;
  De ton pas sepulcral l’enfer guettait le bruit;
  Autour de toi montait, par ton crime attiree,
  L’obscurite du gouffre ainsi qu’une maree;
  Tu penchais sur l’abime ou l’homme est chatie;
  Mais tu viens d’avoir, monstre, un eclair de pitie;
  Une lueur supreme et desinteressee
  A, comme a ton insu, traverse ta pensee,
  Et je t’ai fait mourir dans ton bon mouvement;
  Il suffit, pour sauver meme l’homme inclement,
  Meme le plus sanglant des bourreaux et des maitres,
  Du moindre des bienfaits sur le dernier des etres;
  Un seul instant d’amour rouvre l’eden ferme;
  Un pourceau secouru pese un monde opprime;
  Viens! le ciel s’offre, avec ses etoiles sans nombre,
  En fremissant de joie, a l’evade de l’ombre! 
  Viens! tu fus bon un jour, sois a jamais heureux. 
  Entre, transfigure; tes crimes tenebreux,
  O roi, derriere toi s’effacent dans les gloires;
  Tourne la tete, et vois blanchir tes ailes noires.

LA CONFIANCE DU MARQUIS FABRICE

I

ISORA DE FINAL.—­FABRICE D’ALBENGA

  Tout au bord de la mer de Genes, sur un mont
  Qui jadis vit passer les Francs de Pharamond,
  Un enfant, un aieul, seuls dans la citadelle
  De Final sur qui veille une garde fidele,
  Vivent bien entoures de murs et de ravins;
  Et l’enfant a cinq ans et l’aieul quatre-vingts.

  L’enfant est Isora de Final, heritiere
  Du fief dont Witikind a trace la frontiere;
  L’orpheline n’a plus pres d’elle que l’aieul. 
  L’abandon sur Final a jete son linceul;
  L’herbe, dont par endroits les dalles sont couvertes,
  Aux fentes des paves fait des fenetres vertes;
  Sur la route oubliee on n’entend plus un pas;
  Car le pere et la mere, helas! ne s’en vont pas
  Sans que la vie autour des enfants s’assombrisse.

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