La Légende des Siècles eBook

This eBook from the Gutenberg Project consists of approximately 268 pages of information about La Légende des Siècles.

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—­Bien

—­J’entends du bruit

—­Non, dit Zeno, c’est la bise
Qui souffle betement et qu’on prend pour quelqu’un. 
As-tu peur?

—­Je n’ai peur de rien, que d’etre a jeun,
Repond Joss, et sur moi que les gouffres s’ecroulent!

—­Finissons.  Que le sort decide.

Les des roulent.

—­Quatre.

Joss prend les des.

                           —­Six.  Je gagne tout net,

J’ai trouve la Lusace au fond de ce cornet. 
Des demain, j’entre en danse avec tout mon orchestre. 
Taxes partout.  Payez.  La corde ou le sequestre,
Des trompettes d’airain seront mes galoubets. 
Les impots, cela pousse en plantant des gibets.

Zeno dit:  J’ai la fille.  Eh bien! je le prefere.

—­Elle est belle, dit Joss.

—­Pardieu!

—­Qu’en vas-tu faire?

—­Un cadavre.

Et Zeno reprend: 

                             —­En verite,

La creature m’a tout a l’heure insulte. 
Petit! voila le mot qu’a dit cette femelle. 
Si l’enfer m’eut crie, beant sous ma semelle,
Dans la sombre minute ou je tenais les des: 
’Fils, les hasards ne sont pas encor decides;
Je t’offre le gros lot, la Lusace aux sept villes;
Je t’offre dix pays de bles, de vins et d’huiles,
A ton choix, ayant tous leur peuple diligent;
Je t’offre la Boheme et ses mines d’argent,
Ce pays le plus haut du monde, ce grand antre
D’ou plus d’un fleuve sort, ou pas un ruisseau n’entre;
Je t’offre le Tyrol aux monts d’azur remplis,
Et je t’offre la France avec les fleurs de lis;
Qu’est-ce que tu choisis?’ J’aurais dit:  ‘La vengeance.’ 
Et j’aurais dit:  ’Enfer, plutot que cette France,
Et que cette Boheme, et ce Tyrol si beau,
Mets a mes ordres l’ombre et les vers du tombeau!’
Mon frere, cette femme, absurdement marquise
D’une marche terrible ou tout le nord se brise,
Et qui, dans tous les cas, est pour nous un danger,
Ayant ete stupide au point de m’outrager,
Il convient qu’elle meure; et puis, s’il faut tout dire,
Je l’aime; et la lueur que de mon coeur je tire,
Je la tire du tien; tu l’aimes aussi, toi. 
Frere, en faisant ici, chacun dans notre emploi,
Les Bohemes pour mettre a fin cette equipee,
Nous sommes devenus, pres de cette poupee,
Niais, toi comme un page, et moi comme un barbon,
Et, de galants pour rire, amoureux pour de bon;
Oui, nous sommes tous deux epris de cette femme;
Or, frere, elle serait entre nous une flamme;
Tot ou tard, et malgre le bien que je te veux,
Elle nous menerait a nous prendre aux cheveux;
Vois-tu, nous finirions par rompre notre pacte,
Nous l’aimons.  Tuons-la.

—­Ta logique est exacte,
Dit Joss reveur; mais quoi! du sang ici?

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